Quand on parle d’équilibre…
Si la première mention du terme workaholic (traduit maladroitement en français par « bourreau de travail ») remonte à 1947 selon l’Oxford English Dictionary, il a fallu attendre les années 70 pour que l’on évoque les concepts de burnout et de work-life balance.
Cet équilibre entre vie professionnelle et vie privée est encore souvent présenté comme le reflet d’une vie épanouie et « économiquement appropriée » où l’individu parvient à accorder le juste poids, la juste valeur à chacune de ces deux entités fondamentalement distinctes: la carrière et la sphère intime. C’est ce qu’a illustré l’agence Hudson en établissant une typologie des entreprises en fonction de leur propension à encourager l’harmonie entre vie professionnelle et vie privée, mettant aussi en évidence que ceux des employés qui atteignent l’équilibre apportent davantage de valeur à l’entreprise. A titre d’anecdote, relevons cette étude réalisée par Gallup selon laquelle la satisfaction d’un travailleur augmente de 50% s’il a un ami proche parmi ses collègues.
L’équilibre, un concept qui n’est plus approprié
Depuis quelques années cependant, la pertinence même de ce concept d’équilibre est remise en question, tant pour des raisons d’évolution sociétale que suite à une vision progressivement différente et plus philosophique de ce que l’on nomme encore « travail ».
De fait, commençons tout simplement par la façon dont de plus en plus de gens exercent, envisagent ou même rêvent d’exercer leur profession. Nous sommes en effet très loin de l’époque où l’on pouvait établir sans la moindre hésitation un lien univoque du type un travailleur – un métier – une entreprise – un lieu de travail – une carrière. A l’heure actuelle, entre cumul d’emplois par nécessité, télé-travail (home working) moins chronophage et écologiquement correct et travail à domicile (home based business), les frontières entre travail et vie privée s’estompent progressivement.
Bien entendu, bien plus que les mentalités, les nouvelles technologies sous-tendent cette évolution. Elles annihilent les distances et, un jour, les hologrammes pourront même parfaire l’illusion d’une présence au sein de l’entreprise. Les relations entre collègues comme entre clients et fournisseurs basculeront dans une dimension où le contact sera virtuel mais aussi où l’activité professionnelle ne sera plus associée à un endroit spécifique. Pour l’individu, l’absence d’un lieu de travail centralisé et unique sera bientôt la norme. Des tâches de plus en plus complexes seront effectuées par des machines, des robots à l’intelligence artificielle occuperont des responsabilités managériales. Et tandis que les réseaux sociaux s’invitent déjà tant à notre table qu’au bureau, que les entreprises ont leur « page » et que nous « likons » nos collègues, la multiplication de ces plateformes entraînera sans doute à terme leur fusion voire leur remplacement par un mégacloud dynamique.
Par ailleurs, au-delà de cette évolution, nous pouvons surtout déceler dans le concept d’équilibre vie privée – vie professionnelle une discordance inappropriée. Vouloir établir un équilibre entre deux mondes implique que ceux-ci sont exclusifs et en compétition. Parler d’équilibre induit nécessairement l’idée de déséquilibre. Maintenir l’équilibre devient alors un moyen, une tactique, pas une fin en soi ni une stratégie. De plus, ne pas parvenir à cet équilibre ou le perdre entraîne un stress évident, une dévalorisation de soi et, potentiellement, dysfonctionnement, maladies, frustration, burnout, décès, suicide. Les Japonais utilisent même le terme de karoshi, signifiant « mort due à un excès de travail ».
Parlons plutôt d’intégration
Si l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle n’est donc plus ce vers quoi il nous faut tendre, quelle approche est-il temps de considérer? Ainsi que le soulignent Lisa Earle McLeod et Stew Friedman, ce n’est pas sous forme de dichotomie que désormais nous devons regarder les choses; ce n’est pas une question de choix ou de moment. Autant que faire se peut, vie et travail doivent s’alimenter, être initiés par une même passion, par de mêmes valeurs. Vie et travail doivent être congruents. La clé n’est donc pas une tactique mais une vision holistique. La solution n’est pas de savoir comment prioriser mais comment unir plaisir et raison d’être, essence et activité, plénitude et activité professionnelle. C’est de cette façon que l’épanouissement au travail, à la maison, au sein de sa communauté et en son soi intime devient accessible et durable.
Il ne s’agit donc pas d’une question sémantique. Le concept d’intégration des vies privée et professionnelle est sinon une réalité à tout le moins une nécessité, que cela soit de façon réactive (une adaptation par rapport à une situation professionnelle actuelle) ou proactive (une conception, une implémentation ou une réorientation du plan de carrière). Dans un cas comme dans l’autre, le premier pas vers cette réalité débutera toujours par une démarche de questionnement pouvant être supportée par un coach. Qu’est-ce qui est important pour moi? Pour quoi suis-je fait?
Le rôle du coaching
Dans un prochain article, j’aborderai précisément ce questionnement et développerai des pistes permettant d’aller à la recherche de cette raison d’être tant du point de vue de l’entreprise (Corporate Coaching) que du particulier (Career Coaching).
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